07/04/02 Les interviews (presque) imaginaires : cette semaine Roger Picon a rencontré le Grand Brähman, qui passe pour être l’augure préféré d’IOG.

Mettant
à profit le passage à Paris du grand Brähman,
qui est, comme chacun le sait, le devin d’Ismaël
Omar, nous avons obtenu le privilège d’un
interview exclusif de « Sa Sérénité
» moyennant, par évidence, une aide compensatoire
pour le temps qu’il nous a consacré.

L’Observatoire
:

Votre sérénité, nous vous remercions
de nous avoir accordé cet entretien. Est-il exact
que vous ayez un rôle prépondérant
dans les décisions que prend Ismaël Omar à
Djibouti ?

Brähman
:
Oui, je peux même vous dire en parfaite
confidence, qu’il ne fait rien sans mon avis. Dès
le matin à son réveil, je dois être
à ses cotés et dans un demi-sommeil, il
me pose toujours la même question avant de se réveiller
vraiment …

L’O
:
Laquelle ?

B
:
Où suis-je ? Brahman, tu me promets que
je ne suis pas à Gabode …? Mais si tu me mens,
je suis déjà à Gabode ? Dis-moi que
je ne suis pas à Gabode !!!!!!!!!!

De
temps à autre, je ne peux pas résister au
plaisir de lui faire une farce. Alors, je lui dis que
nous sommes incarcérés à Gabode et
que la Démocratie s’est installée à
Djibouti.

L’O
:
.
Et qu’elle est sa réaction ?

B
:
Il se précipite sous son lit en tremblant
et il appelle Paulette à son secours….

L’O
:
Chacun se pose la question de savoir pourquoi
Ismaël Omar maintient un régime sanguinaire
et de terreur dans le pays ? N’avez-vous jamais essayé
de l’influencer vers des orientations plus vertueuses
?

B
:
J’ai procédé à une étude
complète de son cas, selon la méthode Védique,
dite des Brahâmana et des Äranyaka. Elle explique
tout. C’est un homme qui vit une véritable opposition
interne entre les différentes parties de son corps.
Les bras et les jambes s’opposent en permanence à
la tête et au tronc. Le tronc s’oppose à
la tête. Les jambes s’opposent aux bras. Il vit
un véritable calvaire. L’opposition c’est son problème
à lui. Si vous avez bien saisi cela , vous comprendrez
pourquoi il est allergique à toute forme d’opposition
extérieure à sa personne, puisqu’il mobilise
toutes ses forces pour maîtriser son opposition
interne.

L’O
:
Expliquez-nous, c’est tout même assez
difficile à comprendre cela pour les profanes que
nous sommes.

B
:

Je vais tenter de simplifier. Dans la tête …
chez lui c’est le vide. Au niveau du tronc, on y
trouve une force brute et virile pratiquement incontrôlable.
Observez-le bien lorsqu’il danse, c’est le tronc qui dirige
l’ensemble.

L’O
:
Cela nous l’avions remarqué, mais
pour les autres parties du corps.

B
:
Ismaël Omar est un gaucher à l’origine.
Donc tout ce qu’il va faire et signer de la main
droite sera en totale opposition avec son Moi le plus
profond.

Par
exemple : s’il vous serre la main c’est qu’il
sait déjà au même moment qu’il fera
l’inverse, c’est à dire qu’il sera tenté
de vous prendre à la gorge..

S’il
signe un virement à votre ordre sur le Trésor,
il sait déjà qu’il modifiera le destinataire
et qu’il recevra personnellement les fonds.

L’O
:
Doit-on en déduire que tous les accords
qu’il a signé et que toutes les promesses
qu’il fait ne l’impliqueraient pas, car l’autre moitié
de son corps les aurait refusés ?.

B
:
C’est exactement cela, mais il faut beaucoup
de temps pour que ses interlocuteurs comprennent ce mécanisme
complexe et rarissime, qui n’a jamais été
observé en dehors de quelques rares spécimen
de dictateurs. Et bien souvent, il est trop tard, les
interlocuteurs sont déjà les victimes de
leur crédulité …

C’est
un cas pathologique intéressant… De nombreux
médecins se pencheront sur son corps, le jour de
son décès, pour essayer de faire progresser
la science et à ce moment-là, IOG aura enfin
rendu un service à l’humanité toute entière
… Le seul ?

Quand
aux jambes, il y a en plus un problème de coordination…et
de positionnement d’une jambe par rapport à
l’autre.

Tout
ceci s’explique aisément dans la définition
du Bhoktr.

L’O
:
Et qu’explique cette définition ?.

B
:
Une prédisposition à avancer l’une
des jambes vers l’avant et simultanément l’autre
vers l’arrière, ce qui a comme résultat
qu’il risque en permanence de faire le grand écart
… ou du sur place voire parfois une marche arrière.
Il y a beaucoup d’exemples :


  • son attitude après les accords avec Dini,

  • son
    attitude en faveur du peuple palestinien et le fait
    qu’il ait accordé simultanément une station
    d’écoute à Djibouti aux militaires israéliens,

  • son
    engagement à démobiliser les mercenaires
    et le recrutement en parallèle de nouveaux guerriers,

  • son
    engagement à réaliser des élections
    libres et transparentes et tous les obstacles qu’il
    place pour éviter qu’il n’y ait aucun candidat
    de l’opposition,

  • …..
L’O
:
A l’image de l’ensemble de sa gestion du pays
et des conséquences pour le peuple. Mais il ne tombe
jamais ?


B :
C’est vrai qu’il se prend de plus en plus souvent
les pieds dans le tapis, mais jusqu’à présent,
il a toujours réussi à se maintenir debout,
grâce à la brutalité féroce
du tronc. Un coup de rein au bon moment et jusqu’à
ce jour, il a évité la chute, mais il prélève
trop d’énergie à chaque fois et il ne pourra
pas la renouveler ad vitam. En réalité,
il s’épuise progressivement.

L’O
:

Voulez-vous dire que vous entrevoyez une chute brutale
à court / moyen terme ?
Vous interroge-t-il sur ses préoccupations politiques
actuelles et les éventuels soutiens dont il disposerait
encore ?

B
:
Je l’assiste chaque jour pour qu’il interroge
lui-même les « augures ». Il se met
face au nord du pays avec … une matraque à
la main…

L’O
:
Attendez, je ne comprends pas. Les anciens romains
étaient formels. Ils expliquaient qu’il fallait
se placer face au sud avec un bâton sans nœud
et recourbé, une sorte de canne à la main
pour interroger les augures. Cicéron, à
l’époque romaine, l’explique avec précision.

B
:
Soyons cohérents : ou bien vous me parlez
de Guelleh, ou vous me parlez de culture. Ce sont deux
choses antinomiques et incompatibles. Le premier n’a pas
de culture. La culture n’a pas de Guelleh.

Guelleh
se moque bien de la culture. Il se moque autant des enseignements
des anciens que de l’avenir (je reprendrai cette expression
de Louis XVI « Après moi, le déluge
! »
), il est persuadé qu’il est né
une matraque dans la main … il ajoute que, sans elle,
il a l’impression d’être déshabillé…c’est
l’instrument de son autorité… Il faut dire que
cela remonte à son enfance. Petit, déjà,
lorsqu’il conduisait des troupeaux de dromadaires en Éthiopie
(avant d’être importé à Djibouti),
il les dirigeait avec sa matraque ..

L’O
:
Nous supposons que vous lisez aussi les présages
dans les boyaux de poulets ?

B
:

Pas du tout, parce que ce n’est pas fiable … je préfère
lire l’avenir sur les billets de 100 dollars US …
Faut vivre avec son temps ! Son Excellence est très
généreuse dans ce domaine, dès lors
que je le rassure et que je lui donne des bonnes nouvelles
….De plus comme ce n’est pas son propre argent ..
je ne vois pas pourquoi il me priverait ?

L’O
:
C’est une question de méthode et de support
… effectivement. Est-il serein actuellement ?

B
:
Pas du tout, il est irascible. Il veut emprisonner
tout le monde à Gabode…au point qu’il s’attaque
mêmes aux « chiens errants » … qui
gravitent autour du palais et qui n’osent même
plus aboyer à son passage. Pire encore, il s’en
prend aux écoliers et aux étudiants qu’il
fait bastonner et incarcérer. Par un sursaut d’humanité,
il les fait emprisonner avec leurs familles pour qu’ils
ne sentent pas trop seuls et qu’on ne puisse pas lui reprocher
d’embastiller des mineurs.

Il
dort très mal ….au sujet d’un certain
dossier qu’il a récupéré et
qu’il protège ; il est déposé en
Suisse ….Les menaces qui pèsent sur la société
artificielle de négoce en tous genres …..de recyclage
d’argent avec laquelle il est associée à
Djibouti…. …La jeunesse qui gronde … L’opposition
en exil …..L’affaire du Juge Borrel … Il
a beaucoup trop de soucis actuellement…

Son
déséquilibre, que nous avons évoqué
tout à l’heure s’accentue : il risque désormais
la chute à chaque instant. Je suis vraiment inquiet,
mais comme il me paye bien et sans retard …

L’O
:

Mais au fond, dispose-t-il encore de soutien autour de
lui ?

B
:

J’avoue m’être posé la question encore récemment.
J’ai tenté une expérience pour savoir où
il en était. J’ai pris dans les mains une grosse
liasse de billets de 100 dollars et j’ai fait le tour
du palais de l’Escale en criant « Petit .. Petit … ».
je peux vous assurer qu’ils ont tous couru vers moi :
ministres, proches, opposants de façade.

Tant
qu’il aura de l’argent, il aura des soutiens. Mais il
ne faut pas qu’il en manque, ne serait-ce qu’un seul jour.
Et je crains même qu’il soit condamné à
en donner de plus en plus pour conserver son autorité
apparente.

L’O
:
On comprend mieux pourquoi il est si magnanime
avec certains … notamment dans l’affaire du
Boeing … C’est le jeu du « je te tiens..
tu me tiens par la barbichette » … De plus
cela s’agite dans l’armée, dans les administrations
et au niveau de l’Éducation nationale ….

B
:

Dans la réalité, il est complètement
acculé … le dos au mur. Je lui ai conseillé
de négocier son départ dans les meilleurs
délais … et de partir avec l’oseille.
Sinon, il risque de ne jamais profiter de ce trésor
invraisemblable qu’il a accumulé …. et
de finir, comme il le craint, au fond de lui-même,
à Gabode. Mais je n’insiste pas trop, car ce jour-là,
je perdrai aussi ma seule source de revenus …

L’O
:
Vous êtes en transit à Paris avant
de reprendre un vol pour Bâle …Peut-on en connaître
les raisons ?.

B
:
IOG m’a confié une mission. Il
m’a demandé de déposer dans une Banque suisse,
le contenu de ce gros sac que j’ai avec moi.

L’O
:

Mais c’est illégal ! Ne craignez-vous pas d’être
arrêté à la frontière ?

B
:

Pour le commun des mortels, c’est illégal ! Mais
IOG m’a fait remettre un passeport diplomatique, alors
je passe les frontières sans encombre. Si vous
saviez combien de passeports diplomatiques sont remis
par Djibouti à titre de remerciement, de faveur.

C’est
bien simple, selon mes estimations Djibouti a délivré
plus de passeports diplomatiques que ne l’ont fait l’ensemble
des États du Golfe. Je peux me tromper, mais cela
vous montre l’importance du trafic et la volonté
de se moquer des autres pays, qui ne peuvent pas effectuer
de contrôle … sérieux.

L’O
:

Merci beaucoup pour ces informations intéressantes.
Combien vous doit-on ? Chèques ou espèces
?

B
:

Voyons, cela fait 20 minutes. Je vous consens le tarif
privilégié des amis (Pour Guelleh, c’est
plus cher). Allons, 5.000 USD et nous sommes quittes.
Je vais vous surprendre, mais je préfère
un chèque. Il faudra bien que je puisse justifier
l’origine de ma fortune le jour où IOG se cassera
la figure…